Tant que les femmes ne sont pas en mesure de prendre leurs propres décisions concernant leur corps, l’égalité des sexes restera un rêve inaccessible. L’accès à la contraception est le facteur fondamental qui ouvre un monde de possibilités aux femmes et aux jeunes filles, comme faire des études, travailler, planifier les grosses, avoir une famille en bonne santé et participer pleinement à la société en tant que membres à part entière. La planification familiale volontaire basée sur les droits joue un rôle essentiel dans la réalisation d’avancées en matière d’égalité des sexes. 

En parallèle, une compréhension fine des contraintes et des normes de genre est vitale pour garantir la réussite des programmes de planification familiale. Les dynamiques des genres nocives figurent parmi les obstacles les plus tenaces à l’utilisation de contraceptifs. Les mariages d’enfants, la coercition reproductive, la désinformation et la stigmatisation empêchent toutes les personnes d’agir comme bon leur semble en matière de reproduction et d’accéder à des services de planification familiale. La discrimination fondée sur le sexe au sein du personnel de santé et le manque de participation des femmes dans la conception des programmes engendrent des services inadéquats qui ne répondent pas réellement aux besoins des populations. Les politiques archaïques et le manque de financement pour la santé des femmes diminuent l’éventail de méthodes contraceptives mises à disposition, augmentent la probabilité de rupture de stock et favorisent les problèmes de qualité des services. En conséquence, moins de personnes utilisent la contraception et en bénéficient. 

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L’adoption d’une stratégie volontairement transformatrice en matière de genre est donc essentielle afin d’accélérer la réalisation d’avancées pour l’utilisation des contraceptifs, de promouvoir l’égalité des sexes dans la société dans son ensemble et enfin d’atteindre les objectifs de développement durable.

FP2030 et le genre

Le genre a été une orientation prioritaire pour FP2030 tout au long de l’année dernière. Lors de la 67e session de la Commission de la condition de la femme qui s’est tenue au mois de mars 2023, nous avons lancé la Stratégie du FP2030 en matière d’égalité des sexes, un ensemble d’approches et de principes spécialement conçus pour que FP2030 soit plus efficace, stratégique et représentatif des femmes, des jeunes filles et de toutes les populations. Lors de la conférence internationale dédiée à la santé de la mère et du nouveau-né qui a été organisée au mois de mai, nous avons animé Stronger Together, une séance associant deux thématiques fondamentales liées aux soins (la santé de la mère et du nouveau-né, d’une part, et la planification familiale, d’autre part) afin d’expliquer comment une approche intégrée peut sauver la vie des mères et des nouveau-nés tout en renforçant l’utilisation de la planification familiale post-partum. Au cours de l’événement Women Deliver qui a eu lieu en juillet, nous avons organisé L’équité, c’est l’affaire de tous : L’élargissement du mouvement en faveur du planning familial pour atteindre les ODD, une séance visant à expliquer comment le mouvement pour la planification familiale volontaire est intrinsèquement lié au mouvement plus vaste des droits humains. Il s’agit également du thème de nos deux préconférences de Women Deliver, Girls Deliver et celle liée au genre et à la crise climatique. Lors de la COP28 organisée en novembre dernier, nous avons pu renforcer nos relations avec des spécialistes en environnement, santé et population. Les femmes sont particulièrement vulnérables au changement climatique et bénéficient d’une position exceptionnelle pour agir dans ce domaine. Leurs besoins doivent faire partie de l’équation lors du développement de stratégies d’adaptation. 

Les liens entre la planification familiale et l’égalité des sexes sont le sujet central du rapport de mesure de cette année. Notre ensemble de données couvre 85 pays, y compris le Botswana et la Namibie pour la première fois, deux pays à revenu intermédiaire qui ont désormais pris des engagements dans le partenariat FP2030 et la Jordanie, qui a intégré la catégorie des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure1. Le rapport reflète également les conséquences de la décentralisation du réseau mondial de soutien de FP2030 grâce aux informations fournies par les cinq hubs régionaux, à savoir Asie-Pacifique, Afrique de l’Est et australe, Afrique du Nord, de l’Ouest et centrale, ainsi qu’Amérique latine et Caraïbes. 

Les tendances mondiales croisent le mouvement de la planification familiale à un moment crucial : les avancées réalisées dans l’utilisation des contraceptifs sont concomitantes à la diminution de l’aide internationale et à l’évolution des priorités politiques. Le nombre de femmes qui utilisent une contraception moderne a augmenté de 92 millions depuis le lancement du partenariat en 2012. En outre, la prévalence contraceptive moderne est passée à 35,2 %. Les pays, qui affichaient les niveaux d’utilisation des contraceptifs les plus bas il y a une douzaine d’années, vivent aujourd’hui un véritable essor de la planification familiale. D’autres ont remis au goût du jour, avec succès, des programmes vieillissants. Les implants à action longue durée hautement efficaces sont devenus la méthode de prédilection dans la plupart des pays africains. 

Néanmoins, il existe des signaux d’alerte. La population utilisant des contraceptifs continue d’augmenter, tandis que le financement de la planification familiale à l’échelle mondiale stagne. La prévalence contraceptive dans certains pays se stabilise à des niveaux bas, malgré un pourcentage élevé de femmes qui veulent toujours limiter ou espacer les grossesses. D’autres pays sont passés à une nouvelle étape : la réalisation permanente d’avancées dépendra d’un investissement sérieux dans la transformation des normes de genre et dans le développement à grande échelle des pratiques à haut impact. 

Après une décennie marquée par les avancées dans le cadre du partenariat FP2020 et la résilience lors de la pandémie mondiale de COVID-19, le mouvement international de la planification familiale doit relever de nouveaux défis.

Les profils régionaux explorent en détail une de ces pratiques à haut impact, à savoir la planification familiale post-partum. En 2023, dans les pays à revenu faible et intermédiaire de la tranche inférieure, 59 millions de grossesses étaient non désirées et 80 % de toutes les naissances enregistrées impliquaient des mères adolescentes. Les hubs régionaux de FP2030 ont particulièrement insisté pour que soit menée une étude de l’adoption de la contraception post-partum, l’un des moments les plus importants dans la vie d’une femme. Nous avons étudié les données fournies par chaque région sous l’angle des normes de genre, mais aussi les éventuelles conséquences relatives à l’âge, à la situation matrimoniale et au lieu d’accouchement. Notre analyse révèle l’importance notoire de la mise en place rapide de contrôles postnataux et identifie de graves lacunes dans les soins postnataux existants. 

1.
FP2030 souligne les avancées réalisées par l’ensemble des pays qui n’ont jamais été considérés comme des pays à revenu faible et intermédiaire depuis 2020, selon la classification du revenu national brut (RNB) par habitant de la Banque mondiale, mais aussi par tout pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure qui s’engage dans le partenariat FP2030.

Cette année, grâce aux engagements pris dans toutes les régions appartenant à un hub de FP2030 (Asie-Pacifique, Afrique de l’Est et australe, Afrique du Nord, de l’Ouest et centrale, Amérique latine et Caraïbes), nous élargissons notre champ d’action afin d’inclure ces quatre régions.

Les finances fournissent un rapport sur les flux de ressources pour la planification en 2022. Cette année, elles ont été modernisées pour fournir de meilleures informations sur la manière dont FP2030 et d’autres partenaires d’échange de données collaborent afin de suivre les dépenses en matière de santé sexuelle et reproductive. Nous expliquons pourquoi la planification familiale est financée par trois types d’investissements, à savoir les ressources publiques nationales, les fonds versés par les bailleurs, ainsi que les dépenses des consommateurs et consommatrices. 

Tandis que nos toutes dernières estimations de dépenses publiques nationales (1,68 milliard de dollars américains), d’une part, et des consommateurs et consommatrices (710 millions de dollars américains) d’autre part, sont au même niveau que des estimations antérieures, les contributions des gouvernements bailleurs de fonds connaissent une tendance à la baisse. Les financements provenant des gouvernements bailleurs de fonds qui ont été estimés pour l’année 2022 (1,35 milliard de dollars américains sont 10 % inférieurs aux calculs de l’année précédente et 15 % en dessous du pic atteint en 2019. Aujourd’hui, les financements provenant des gouvernements bailleurs de fonds sont à leur niveau le plus bas depuis 2015. Or, la population des femmes en âge de procréer a augmenté de 20 % depuis la création de ce partenariat en 2012. 

Si les financements provenant des bailleurs de fonds continuent de stagner ou de diminuer, cela pourrait compromettre la réalisation des objectifs des pays en matière de planification familiale et des objectifs de développement durable. Les financements provenant des bailleurs de fonds constituent seulement un élément des ressources totales. Néanmoins, ils jouent un rôle fondamental, car ils aident les pays à élargir et à renforcer leurs programmes de planification familiale, à garantir l’approvisionnement en produits et à intégrer des contraceptifs plus chers dans la gamme de méthodes. 

Le financement de la planification familiale à l’échelle internationale est composé de trois éléments, à savoir les dépenses publiques nationales, les contributions des bailleurs de fonds internationaux, mais aussi les dépenses des consommateurs et des consommatrices.

Un appel à l’action

Les résultats mentionnés dans le présent rapport recommandent des priorités claires autour desquelles la communauté de la planification familiale doit se rassembler.

Investissement pour garantir des niveaux de financement correspondant au nombre actuel et futur d’utilisateurs et d’utilisatricese. Depuis 2012, le nombre de femmes en âge de procréer a augmenté de 20 %, une tendance qui se poursuit. Les pays et leurs partenaires bailleurs de fonds doivent développer des plans de ressource à long terme afin de s’assurer que les programmes de planification familiale bénéficient d’un financement approprié dans un avenir prévisible. Quel niveau de dépenses est requis pour répondre aux besoins d’une population en pleine expansion, aujourd’hui comme au cours des prochaines années ? Quelles dépenses supplémentaires sont nécessaires pour élargir et renforcer les services, conformément aux objectifs nationaux ? Ces prévisions devraient orienter la planification des ressources au sein des pays, auprès des bailleurs de fonds et dans le secteur mondial de la planification familiale.  

Investissement pour favoriser et élargir l’accès aux implants partout dans le monde. Les implants sont devenus très populaires en Afrique. Ils pourraient s’imposer comme l’une des solutions pour obtenir des améliorations sur le long terme de la prévalence contraceptive. Cependant, ils restent chers et doivent être financés par la communauté internationale. Nous avons besoin de garantir l’accès aux implants là où cette méthode existe déjà, mais aussi de l’élargir aux régions et aux groupes démographiques qui ont été oubliés.  

Investissement dans la planification familiale post-partum (et d’autres pratiques à haut impact). La planification familiale post-partum est une intervention fondamentale qui a démontré sa capacité à sauver la vie des mères et des nouveau-nés, mais aussi à augmenter l’adoption de la contraception. Nous devons combler les lacunes dans le continuum de soins et garantir à chaque mère la prestation rapide de soins postnataux accompagnés de conseils en planification familiale qui sont adaptés à leurs besoins. Ces services ne doivent pas être refusés aux femmes jeunes ou non mariées. En outre, la qualité des soins doit être identique, indépendamment de l’établissement où ils sont fournis.

Investissement dans les approches transformatrices en matière de genre de la planification familiale afin de faire évoluer les normes et d’optimiser l’égalité des sexes. Il s’agit d’un travail sur le long terme qui nécessite un véritable engagement à œuvrer pour le changement social. Néanmoins, il est essentiel si nous souhaitons réaliser des avancées durables en matière de planification familiale fondée sur les droits. Les interventions et les programmes transformateurs en matière de genre sont conçus pour remettre en question activement les normes de genre, pour éliminer les inégalités de pouvoir entre les hommes et les femmes, mais aussi pour promouvoir l’autonomisation des femmes dans toutes les sphères de leur vie, depuis la prise de décisions sur leur vie reproductive jusqu’à leur implication dans le leadership politique au sein de leurs communautés.

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La contraception concerne au fond l’autonomie corporelle. Le mouvement militant pour la mise à disposition de toutes les populations des contraceptifs modernes fait partie intégrante de la défense des droits humains, de la dignité et de l’égalité.

L’adoption d’une approche transformatrice en matière de genre a également une incidence sur les indicateurs de planification familiale. Les mesures de la réussite doivent dépasser la prévalence contraceptive moderne afin de déterminer les degrés d’autonomisation reproductive : il s’agit de la capacité des personnes à prendre des décisions informées sur leur vie reproductive et à atteindre leurs objectifs dans ce domaine. D’un point de vue technique, cela représente un défi complexe que FP2030 et d’autres partenaires d’échange de données sur la planification familiale ont déjà commencé à relever (voir la section Futures tâches). 

À mesure que la campagne mondiale en faveur de l’égalité des sexes gagne en solidité, FP2030 affirme l’importance vitale de la planification transformatrice en matière de genre qui est fondée sur les droits. La contraception concerne au fond l’autonomie corporelle. Le mouvement militant pour la mise à disposition de toutes les populations des contraceptifs modernes fait partie intégrante de la défense des droits humains, de la dignité et de l’égalité. FP2030 s’engage à promouvoir, faciliter et mettre en œuvre cette priorité, mais aussi à développer de meilleurs outils de données qui reflètent véritablement les expériences vécues par les femmes et les jeunes filles. 

Qui comptons-nous ?

Tout au long de ce rapport, il est question de femmes ou de femmes et de jeunes filles, ce qui devrait être compris comme incluant les femmes et les jeunes filles en âge de procréer (de 15 à 49 ans). Cependant, toutes les personnes enceintes ne sont pas des femmes et des jeunes filles ; les hommes transgenres et les personnes non binaires peuvent être enceintes et cela leur arrive. Cependant, les données utilisées dans ce rapport proviennent en grande partie d’enquêtes et d’études qui identifient les participants et participantes comme étant des femmes ou des jeunes filles. L’élargissement des conclusions de ces données pour inclure les personnes de genre différent pourrait entraîner des inexactitudes ou même l’effacement des préoccupations spécifiques aux minorités sexuelles (UNFPA, État de la population mondiale 2022). Par conséquent, nous calculons l’utilisation des contraceptifs et mesurons la fréquence d’utilisation des méthodes contraceptives sur la base des femmes et des jeunes filles qui utilisent ces méthodes, tout en reconnaissant que certains utilisateurs et utilisatrices pourraient s’identifier comme des hommes transgenres ou des personnes non binaires. 

Nous reconnaissons également que les données utilisées dans le présent rapport peuvent ne pas représenter certains groupes marginalisés, comme les personnes porteuses de handicaps, les migrants et les migrantes, les populations réfugiées et les minorités ethniques, pour lesquels les données ne sont pas recueillies systématiquement à l’aide d’enquêtes auprès des ménages ou d’autres outils de collecte régulière des données. 

En outre, les informations fournies par les pays connaissant des crises peuvent ne pas refléter les conséquences des tensions exercées sur l’utilisation des contraceptifs et les services de planification familiale. 

Les systèmes de données peuvent ne pas récupérer les données pour l’ensemble des groupes ni dans les situations à l’évolution rapide. Cependant, FP2030 s’engage à faire progresser la santé et les droits sexuels et reproductifs pour tout le monde, mais aussi cherche à obtenir des données sur les défis entravant l’accès autres que les informations communiquées dans le présent rapport.

TENDANCES MONDIALES

Un aperçu des avancées réalisées à un moment crucial

Après une décennie marquée par les avancées dans le cadre du partenariat FP2020 et la résilience lors de la pandémie mondiale de COVID-19, le mouvement international de la planification familiale doit relever de nouveaux défis. L’utilisation des contraceptifs continue à augmenter et les programmes prennent de l’ampleur dans nombre de pays. Cependant, comme les données l’indiquent, les niveaux de l’aide au développement provenant de pays étrangers stagnent. Les conflits géopolitiques qui secouent actuellement l’Ukraine et le Moyen-Orient détournent l’aide au développement et mettent la coopération internationale à rude épreuve. En outre, le mouvement mondial qui nie les droits sexuels et reproductifs, notamment chez les adolescents, les adolescentes et les personnes LGBTI, a connu un regain de force lorsque la Cour suprême américaine a annulé le droit à l’avortement. Ensemble, ces défis suggèrent que la planification familiale arrive à un point crucial. Il n’est pas garanti que d’autres avancées soient réalisées en matière de planification familiale. En outre, des signaux d’alerte proviennent des données régionales, nationales et internationales. 

Malgré les défis à relever, les informations collectées cette année reflètent la dynamique permanente de la croissance des contraceptifs et l’accès aux services de contraception dans de nombreux pays. Le nombre des femmes en âge de procréer (de 15 à 49 ans) dépasse le milliard dans les 85 pays étudiés. Au milieu de l’année 2023, 377 millions de ces femmes utilisaient une méthode moderne de contraception, selon les estimations (voir la figure 1). Leur utilisation de la contraception moderne a permis d’éviter 141 millions de grossesses non désirées, 30 millions d’avortements à risque et 141 000 décès maternels au cours de la seule année écoulée. 

Figure 1

Nombre total d'utilisatrices de méthodes contraceptives modernes 2012-2023 (All Women) dans les pays à revenu faible ou intermédiaire de la tranche inférieure

  • Actuel
  •  

    Asie du Sud

  •  

    Asie de l’Est et Pacifique

  •  

    Afrique sub-saharienne

  •  

    Moyen-Orient et Afrique du Nord

  •  

    Europe et Asie centrale

  •  

    Amérique latine et Caraïbes

Le nombre de femmes qui utilisent une contraception moderne a augmenté de 92 millions depuis le lancement du partenariat en 2012.Cela s’explique en partie par la croissance de la population : le nombre de femmes en âge de procréer dans les 85 pays a grimpé de 177 millions depuis 2012, soit une hausse de 20 %. Autre raison, une proportion croissante de femmes choisissent d’utiliser une méthode moderne de contraception. Aujourd’hui, parmi l’ensemble des femmes en âge de procréer, 35,2 % utilisent un contraceptif moderne, contre 31,9 % il y a douze ans. Cette augmentation reflète la capacité du partenariat FP2030 à « inverser la courbe » et élargir la planification familiale fondée sur les droits. 

Malgré la hausse de 3,3 points de pourcentage de la prévalence contraceptive moderne dans les 85 pays, cette moyenne est largement pondérée par les nations très peuplées d’Asie qui affichent déjà une prévalence élevée et, par conséquent, progressent lentement. La moyenne globale occulte la croissance extrêmement rapide dans les autres régions (voir le tableau 1). Sub-Saharan Africa leads the world, with an increase of 6.4 percentage points since 2012 — twice the average rate of growth. This works out to 32 million additional users of modern contraception just in Sub-Saharan Africa alone.  L’Afrique subsaharienne est en tête, avec une hausse de 6,4 points de pourcentage depuis 2012, soit deux fois le taux de croissance moyen. Au total, 32 millions de personnes supplémentaires utilisent des méthodes modernes de contraception en Afrique subsaharienne seulement. 

TABLEAU 1

Augmentation en points de pourcentage de la fréquence d'utilisation de la contraception moderne, 2012-2023

Fréquence d’utilisation de la contraception moderne

Augmentation en points de pourcentage 2012-2023

2012

2023

Afrique sub-saharienne

17,1 %

23,4 %

6,4 %

Amérique latine et Caraïbes

36,2 %

 41,3 %

5,1 %

Asie du Sud

35,9 %

39,8 %

3,9 %

Asie de l’Est et Pacifique

38,0 %

38,9 %

0,9 %

Europe et Asie centrale

37,7 %

39,5 %

1,8 %

Moyen-Orient et Afrique du Nord

34,3 %

37,4 %

3,1 %

Une autre méthode de visualisation de la croissance consiste à observer la hausse annuelle moyenne de la prévalence contraceptive moderne, en fonction des régions et des pays (voir la figure 2). Dans l’ensemble des régions, cette augmentation correspond à 0,3 % chaque année. Toutefois, les régions connaissant la croissance la plus rapide (à savoir l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique de l’Est et australe) affichent un taux deux fois supérieur à ce chiffre. Dans six pays (le Burkina Faso, Madagascar, le Malawi, le Mozambique, l’Ouganda et la Sierra Leone), la prévalence contraceptive moderne a augmenté de plus de 1 point de pourcentage chaque année depuis 2012. Ces résultats sont remarquables, notamment face aux défis posés par la stagnation des financements et les perturbations de la pandémie de COVID-19.

FIGURE 2

Croissance annuelle de la PCM par région

Notes graphiques : Ce graphique montre l'augmentation annuelle moyenne en points de pourcentage du SMC (chez toutes les femmes) de 2012 à 2023 dans toutes les régions, pour tous les pays à revenu faible et moyen inférieur. Les pays sans barre indiquent une augmentation de zéro point de pourcentage du SMC.

Grâce à une étude plus approfondie des données, davantage de témoignages de réussite ont pu être recueillis.

Changements impressionnants de la prévalence contraceptive moderne dans les pays à prévalence faible. Dans nombre de pays qui se situaient tout en bas de la courbe en S de la croissance contraceptive ou à proximité en 2012, l’utilisation de méthodes modernes a beaucoup augmenté. Aujourd’hui, ces nations se trouvent plutôt au milieu de la courbe, où des avancées rapides sont possibles.

Ce schéma est particulièrement évident dans les pays d’Afrique de l’Ouest, notamment le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Malila République démocratique du Congole Sénégal, et le Togo. Pour tirer parti de ce potentiel, un engagement permanent doit être pris vis-à-vis des facteurs liés à l’approvisionnement (le soutien politique, le financement, la disponibilité des produits et les pratiques à haut impact), mais aussi une attention accrue doit être portée aux obstacles sociaux et fondés sur le genre qui limitent la demande. 

Augmentation de la prévalence contraceptive moderne au-delà des contraintes liées à la demande. TLa courbe de demande pour la prévalence contraceptive maximale a été développée par Track20 pour façonner le taux le plus élevé de prévalence contraceptive moderne qui pourrait être atteint dans un pays compte tenu du niveau existant de la demande en planification familiale. Pour les pays proches ou au-dessus de la courbe, la demande est une contrainte : la prévalence contraceptive moderne ne peut probablement pas augmenter sans modification des normes sociales et une hausse de la demande. L’Ouganda et la Zambie ont réussi à dépasser leurs contraintes en matière de demande en obtenant d’importantes augmentations de la prévalence contraceptive moderne malgré les limites théoriques. Ces pays semblent connaître une véritable hausse de la demande, sans doute à cause du changement de comportements par rapport à la contraception et à la disponibilité de méthodes plus attrayantes.  

Popularité et disponibilité croissantes des implants. En 2012, les implants étaient la méthode de contraception moderne la plus couramment utilisée dans seul un pays (le Burkina Faso). Aujourd’hui, les implants constituent la méthode la plus utilisée dans 11 pays et la deuxième méthode la plus courante dans 16 autres pays. Cette étonnante transformation a été possible grâce au Programme d’accès aux implants, un partenariat public-privé qui divise par deux le prix des implants contraceptifs dans les pays engagés dans le partenariat FP2020 à l’aide de garanties en matière de volumes. Dans le cadre de ce programme, des prestataires ont suivi une formation à l’insertion et au retrait des implants, mais aussi ont développé une sensibilisation aux contraceptifs réversibles à action longue durée (LARC) au sein des communautés. Les implants sont devenus très populaires. Ils pourraient s’imposer comme l’une des solutions pour obtenir des améliorations sur le long terme de la prévalence contraceptive, en supposant que l’aide financière continue d’être versée2.

2.
L’AMPR-SC, un nouveau type d’injection sous-cutanée pouvant s’autoadministrer, est une autre technologie contraceptive que les parties prenantes de FP2020 se sont efforcées de développer et de présenter ensemble. L’AMPR-SC a été lancée dans des pays choisis. Toutefois, les données sont toujours insuffisantes pour en évaluer l’incidence et pour savoir si cette méthode est intégrée à la prestation de services de planification familiale.

Apparition de signaux d’alerte

D’après les informations recueillies cette année, les avancées permanentes sont loin d’être garanties pour les prochaines années. Des signaux d’alerte indiquent que davantage de ressources, des stratégies plus ambitieuses et des engagements plus importants seront nécessaires. 

Population d’utilisateurs et d’utilisatrices de contraceptifs supérieure au financement. A

Comme nous l’avons expliqué précédemment, la population des femmes en âge de procréer a augmenté de 20 % depuis 2012, tandis que le nombre d’utilisateurs et d’utilisatrices de contraceptifs a connu une hausse de 92 millions. Cependant, le financement provenant des gouvernements bailleurs de fonds diminue et a désormais atteint son niveau le plus bas depuis 2015 (voir la section dédiée aux finances). Le financement provenant des bailleurs de fonds est une composante essentielle des ressources totales pour la planification familiale, aux côtés des dépenses publiques nationales, mais aussi des consommateurs et des consommatrices. Si l’aide des bailleurs de fonds continue de baisser, il pourrait devenir difficile pour certains pays de conserver le nombre actuel d’utilisateurs et d’utilisatrices de contraceptifs, mais aussi quasi impossible de l’augmenter. 

La stagnation des financements se révèle particulièrement problématique lorsque les méthodes sont dépendantes des bailleurs de fonds, à l’instar des implants contraceptifs. Il est important d’intégrer ces derniers dans la gamme de méthodes : ils doivent être mis à la disposition de l’ensemble des utilisatrices et utilisateurs éventuels au sein de toutes les régions géographiques. Or, cette méthode est relativement chère et requiert d’être subventionnée par les bailleurs de fonds.

Stagnation des avancées des pays. La pandémie de COVID-19 a retardé la réalisation d’enquêtes démographique et de santé au sein des pays, qui ont repris en grand nombre une fois la crise passée. Depuis 2021, nous avons dû analyser 12 nouvelles enquêtes nationales. Ainsi, nous avons remarqué que les avancées semblaient avoir stagné dans certains pays. Par exemple, au Honduras, au Nigeria, au Pakistan, et en Tanzania la prévalence contraceptive moderne a plafonné ou progressé bien plus lentement par rapport aux estimations précédentes. Chaque pays est confronté à son lot unique d’obstacles. Il peut notamment s’agir d’un ensemble de facteurs, comme les défis politiques, les problèmes de financement, de prestation de services ou d’approvisionnement en produits, ou bien des normes de genre ancrées qui entravent la demande. (Dans certains cas, les raisons peuvent être complètement externes au champ d’application du programme de planification familiale. Par exemple, au Nepal, la prévalence contraceptive moderne n’a quasiment pas évolué depuis 2012. Or, ce pays connaît une importante migration de la population masculine. Par conséquent, les femmes ont moins besoin de contraception.) Quoi qu’il en soit, les avancées permettant d’élargir la planification familiale ne sont pas garanties si aucune attention n’est portée aux facteurs susceptibles d’entraver la croissance.

Ralentissements imminents dans les pays auparavant à prévalence faible. Les pays à croissance rapide qui sont passés du bas de la courbe en S à son milieu s’approchent de niveaux où il peut être impossible de réaliser des bénéfices supplémentaires si la stratégie n’est pas modifiée. La plupart de ces pays devront investir dans des projets de communication, mais aussi de changement social et comportemental afin de gérer les limitations et les normes de genre existantes entravant le pouvoir de prise de décisions des femmes. En outre, ils devront développer à plus grande échelle les pratiques à haut impact, comme la planification familiale après la grossesse (post-partum et après l’avortement), qui permettent de sensibiliser les femmes et les jeunes aux moments les plus importants de leur vie.

Nouveauté du rapport de cette année : plus de pays, de données et de précisions

Le rapport de mesure de cette année couvre 85 pays, composés des 82 nations classées comme pays à revenu faible ou intermédiaire de la tranche inférieure en 2020, de nouveaux preneurs d’engagement (le Botswana et la Namibie), qui font partie des pays à revenu intermédiaire, mais aussi la Jordanie, qui est repassée dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure, selon la liste actualisée que la Banque mondiale a publiée en juillet 20233. Nous reconnaissons que nos critères d’inclusion actuels mentionnés dans le rapport de mesure excluent un grand nombre de pays d’Asie, d’Amérique latine et des Caraïbes. Nous continuerons d’évaluer la portée géographique du rapport au cours des prochaines années du partenariat. 

Outre l’étude d’un nombre inédit de pays, le rapport de mesure de cette année (ainsi qu’un nouveau tableau de bord et des ressources de données) fournit davantage d’informations sur l’utilisation des contraceptifs, la santé sexuelle et reproductive chez les jeunes, les adolescents et les adolescentes, mais aussi les tendances financières, une première dans les rapports de mesure de FP2030. En se fondant directement sur les commentaires recueillis auprès des points focaux de FP2030, des responsables du suivi et de l’évaluation des pays, mais aussi des défenseurs au sein de la société civile et chez les jeunes, FP2030 continue de développer des ressources et de fournir une visibilité supplémentaire sur ces données. L’ensemble de données de cette année a connu des changements particuliers, notamment de nouvelles informations sur les dépenses nationales des gouvernements, y compris celles liées au personnel, aux produits et à d’autres éléments du programme de planification familiale. En outre, FP2030 publie désormais des données sur les tendances des dépenses nationales à partir de l’année 2020. Chacune de ces avancées est le résultat du travail du projet Track20 d’Avenir Health dédié à l’évaluation annuelle des dépenses de planification familiale, qui s’est fondé sur une méthode et un processus cohérents afin d’aider les gouvernements à suivre leurs dépenses en planification familiale au cours des dernières années. 

3.
FP2030 reports progress for all countries that have ever been categorized as low-income or lower-middle income since 2020, based on the World Bank’s GNI per capita classification, as well as any upper-middle income country that makes an FP2030 commitment.

FIGURE 3

Processus annuel de mesure et d’établissement de rapports du FP2030

Au cours d’une année, Track20, FP2030 et d’autres partenaires produisent et publient des données sur les progrès du mouvement. Les estimations d’indicateurs de FP2030 sont produites par l’équipe Track20 et les responsables du suivi et de l’évaluation dans les pays. 

1) Some FP2030 indicator estimates are produced by FPET, while others come from surveys and Health Management Information Systems (HMIS). The indicators cover various dimensions of family planning, based on a results chain that covers aspects of the enabling environment for family planning, the process of delivering services, the output of those services, expected outcomes, and the impact of contraceptive use. Read more about the indicators in the FP2030 Measurement Framework.
2) Consensus meetings are held in countries with Track20 M&E Officers. During consensus meetings, governments and partners review family planning data, including discussions on data quality, utilization of statistical models and other methodologies to produce estimates; and assessment of progress towards goals. FPET estimates are used for FP2030 reporting even for countries without Track20 M&E Officers. However, these estimates are not validated during a consensus meeting. FPET is available is for use by all partners and can be accessed through www.track20.org.

Autre nouveauté, le présent rapport a continué d’être orienté vers l’amélioration du reporting de la prise de décisions en matière de planification familiale, ce qui alimente les rapports sur l’indicateur 5.3.1 des objectifs de développement durable dédié à la prise de décisions et au genre. Cet indicateur est conçu pour déterminer la mesure dans laquelle les femmes participent aux décisions quant à l’utilisation ou non de contraception. Le présent rapport reflète un changement décidé par le groupe de travail Suivi des performances et résultats de FP2030 : au lieu de signaler si les femmes font leur choix seules ou avec leur mari, il distingue les femmes qui déclarent prendre réellement leurs décisions par elles-mêmes. 

Futures tâches

Les avancées en matière de mesure et les données restent des aspects essentiels de la stratégie de FP2030. Outre l’amélioration de la disponibilité des données, nous nous efforçons de promouvoir des priorités de mesure au sein de FP2030 en vue de relever les défis qui se présentent sur notre chemin, à savoir évaluer les inégalités des programmes de planification familiale, mesurer la qualité des soins (y compris l’expérience de la patientèle), jauger l’autonomie et l’autonomisation, déterminer l’influence des normes de genre sur la planification familiale et surveiller le développement à grande échelle des pratiques à haut impact. 

En 2024, en collaboration avec plusieurs partenaires, comme le groupe Suivi des performances et résultats, le projet Momentum Facilitateur d’apprentissage, le groupe Suivi de la performance et redevabilité, Track20 et le comité de pilotage de la planification familiale post-partum et post-avortement, nous organisons une série de réunions d’avancement des mesures. Ces consultations sont conçues pour encourager une participation plus inclusive aux priorités mondiales en matière de mesure de la planification familiale, en se fondant particulièrement sur les parties prenantes et les spécialistes des pays en Afrique, en Asie, en Amérique latine et aux Caraïbes. L’objectif est de développer un programme d’actions orienté à l’échelle locale afin d’identifier les priorités, de relever les défis de longue date, d’améliorer les mesures existantes et de créer des indicateurs.

PHOTO DE Yagazie Emezi/Getty Images/Images of Empowerment